Joey Starr monte à la Tribune avec cet humble pupitre constitué d'un baril métalique couleur sombre, dur et déformé, à l'intérieur c'est aussi un bar caché avec un système de rotation et de rangement pour les verres et les bouteilles. Le pupitre est éclairé d'une lampe dans une fleur de métal, un serpent fait de ressort porte le micro et enfin une caméra attachée à un cable donne un d'aspect tentaculaire à l'ensemble. Un objet retro-futuriste créé par Arzée pour la piéce .
Disponible à la vente
Résumé de la pièce de théâtre
Joey Starr… On connaît le rappeur et l’acteur de cinéma, mais pas le comédien de théâtre.
Joey Starr pour la première fois au théâtre dans ÉLOQUENCE À L’ASSEMBLÉE
« Spectacle atypique, historique et contemporain. Joey Starr met sa puissance charismatique au service de ce qu’il y a de plus beau : l’humanisme…. »
« Les discours prononcés à l’Assemblée Nationale sont faits pour être entendus.
Il faut entendre Robespierre. Il faut entendre Victor Hugo. Il faut entendre Lamartine, Olympe de Gouges, Simone Veil et Aimé Césaire. Écrivains, révolutionnaires, aventuriers ou chef de guerre, ce sont de grandes plumes à voix haute.
Il fallait une voix, il fallait un coeur à la hauteur, pour prononcer ces mots.
Joey Starr s’est accaparé ces textes d’hommes et de femmes courageux.
Il nous les restitue avec une force et une émotion qui bouleversent:
on entend le peuple gronder dans sa gorge…»
Un spectacle écrit par Pierre Grillet et Jérémie Lippmann
Le geste force le respect : monter sur scène comme on monte à la tribune des grands anciens pour déclamer des extraits de certains des plus beaux textes sur la liberté, l’égalité et la fraternité des plus éloquents membres de l’Assemblée nationale depuis la Révolution.
Humblement, Joey Starr lit sur un prompteur, mais, dans la bouche de celui qui voulait « mettre le feu », les mots de Victor Hugo sur la nécessité morale d’abolir la misère, ceux de l’abbé Grégoire sur la langue française comme arme de paix communautaire, et surtout la harangue de Lamartine sur, déjà, la corruption du système et le « libéralisme menteur », résonnent aujourd’hui et maintenant, et reprennent chair. La chair d’un fauve métamorphosé en passeur convaincu.
De temps en temps, Joey Starr trébuche sur un mot, mais c’est pour mieux repartir, vibrant, et finir sur un trio superbe : Simone Veil, Aimé Césaire et André Malraux.
Le droit des femmes à disposer de leur corps, le respect des anciens colonisés et l’appel à la culture. Puis il quitte la scène.
Le décor simple et détonnant avec un lieu, le pupitre est une création original et intriguante, une lumière, une caméra attachée à un cable lui donnent un drôle d'aspect. Un canapé de cuir est disposé sur un des côtés de la scène. Le public est assez jeune. Je relève la présence de quelques lycéens venus réviser leur bac avec Joey Starr, ce drôle de prof qui dit des gros mots. Tout-à-coup, le bruit d'un coeur qui bat. Une respiration haletante. On entend le fauve avant de le voir.
Joey Starr apparaît au fond de la scène. Il fait les cent pas, comme un boxeur avant de monter sur le ring. Aucun challenger ne l'attend. Son souffle ne servira pas à faire plier un adversaire de chair et d'os, mais à redonner vie, sang, couleurs, à des morceaux d'éloquence politique qui sommeillent dans les anthologies.
Ça commence comme un coup de poing, avec un âpre discours de Robespierre. Ce sont ses derniers mots à la tribune. Il les prononce le 26 juillet 1794, deux jours avant sa mort. "Je suis là pour combattre le crime, non pour le gouverner (...) Les défenseurs de la liberté ne seront que des proscrits tant que la horde des fripons dominera".
Sobrement vêtu de noir, il passe du pupitre à l'avant scène, et de l'avant scène au pupitre. Il lit les textes en les scandant avec son poing fermé.
Il est suivi d'un texte de Lamartine, prononcé en 1843, sur "le système et le vice". Lamartine défend la paix ("les traités sont des victoires") contre ceux qui veulent imposer par les armes le libéralisme (mais au XIXe siècle cette notion n'a pas le même sens qu'aujourd'hui et renvoie à la liberté politique). Puis le profil de Victor Hugo sur son lit de mort se détache sur l'écran derrière Joey Starr qui reprend son célèbre discours sur la misère. Il aurait pu avoir été écrit la semaine dernière: "Je ne suis pas de ceux qui croient qu'on peut supprimer la souffrance mais je suis de ceux qui affirment qu'on peut détruire la misère, la misère peut disparaître comme la lèpre a disparu". Quand il parle de misère, quelque chose de très intime semble résonner. Il scande le texte, toujours avec ce mouvement de son bras droit et son poing fermé. Tête haute, investi, il harangue le public. Son principal atout, bien sûr, c'est sa voix. Rêche et rauque, grondante et grouillante, pleine de cailloux, d'épines, d'échardes, elle est comme un étendard pour toutes les révoltes. Mais elle est difficile à dominer, cette voix. Trop d'émotion, trop de passion, trop de colère la font sortir de ses digues.
Mais en tous cas, cette voix toujours prête à se laisser déborder par sa propre violence donne relief et urgence à des textes rédigés dans une langue soutenue, assez éloignée des codes oratoires actuels.
A chaque fois que Joey Starr s'empare des textes de Victor Hugo, dont les envolées rythment le spectacle, c'est réussi. Comme par exemple, dans ce discours de 1851, où il s'attaque au parti clérical. Le spectacle touche juste, également, quand Joey Starr redonne vie aux propos d'Olympe de Gouges.
Olympe de Gouges...Cette grande figure du féminisme avait eu l'audace de publier une Déclaration de la femme et de la citoyenne pour répondre à la très masculine Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Son visage doux et résolu est projeté sur l'écran derrière Joey Starr. Par delà les siècles, ses phrases vives nous touchent en plein coeur : "Homme es-tu capable d'être juste? C'est une femme qui t'en fait la question.... La femme a le droit de monter sur l'échafaud, elle doit avoir également celui de monter à la tribune". Mais les révolutionnaires n'aimaient pas celles qui leur tenaient tête. C'est pourquoi ils coupèrent la sienne en novembre 1793.
Joey Starr incarne, de manière sobre et convaincante, sans oublier d'y associer la Guyane, le discours d'Aimé Césaire interpellant en juillet 1949 le ministre de l'intérieur Jules Moch sur la répression des manifestations dans les Antilles. "Quand nous voulons nous assimiler, nous intégrer, vous nous rejetez, vous nous repoussez. Quand les populations coloniales veulent se libérer, vous les mitraillez!".
Et l'on approche de la fin du spectacle. Joey Starr lit un discours historique, celui prononcé par Simone Veil devant l'assemblée nationale le 26 novembre 1974 à l'occasion de la loi autorisant l'interruption volontaire de grossesse.
Puis le spectacle se conclut par un très court extrait du discours d'André Malraux.
Tout au long du spectacle, il a mis son énergie et sa sincérité au service de ces textes. Il s'est révélé un excellent passeur de colères, faisant entendre la fureur, la passion grondante qui animaient Robespierre ou Victor Hugo. La colère sans cette étincelle, rien n'est possible. Pas de sursaut, pas de réveil, pas d'action collective. Avec les temps déraisonnables qui sont devant nous, elle est sans doute plus précieuse que jamais.
Texte : JF Mondot
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